Note d’information – 26 novembre 2025
Processus d’adoption des technologies médicales en milieu hospitalier au Québec
L’intégration d’une nouvelle technologie médicale dans le réseau hospitalier québécois repose avant tout sur un processus administratif rigoureux, encadré par la Loi sur les contrats des organismes publics (LCOP) et ses mécanismes d’approvisionnement. Ce cadre vise à assurer la transparence, l’équité et la conformité des acquisitions, tout en permettant une certaine ouverture à l’innovation lorsque les conditions le permettent.
Ce processus s’applique à tout produit n’ayant pas encore été vendu au Québec, et son cheminement dépend de la possibilité de rattacher ou non la nouveauté à une catégorie d’achat existante.
Il convient de souligner que l’adoption des innovations pharmaceutiques suit un processus distinct. De même, les tests diagnostiques, les produits dérivés du sang ou les produits biologiques, tels que les greffons, comportent des particularités qui leur sont propres.
Le texte suivant explique le schéma ci-joint.
1.Le point de départ : la nouveauté et les seuils LCOP
La première étape consiste à déterminer si le produit peut s’insérer dans une catégorie déjà achetée par un établissement. Si c’est le cas, la démarche suit le chemin LCOP classique, c’est-à-dire les voies normales d’approvisionnement public.
Dans le cadre de la LCOP, la voie de l’appel d’offres public s’applique à tous les marchés dont la valeur du contrat, pour sa durée totale, dépasse 133 799 $. Pour un contrat dont la valeur est inférieure à 133 800 $, un contrat de gré à gré est possible. Cette disposition offre une marge de flexibilité pour les déploiements d’innovation limités ou les projets de validation à petite échelle.
2.Le chemin LCOP classique – Catégorisation et approvisionnement
Lorsqu’une catégorie existante est identifiée, il faut déterminer si elle est négociée par le Centre d’acquisitions gouvernementales (CAG).
Si oui, le produit doit être soumis à un appel d’offres regroupé, géré par le CAG en consultation avec les établissements.
Si non, on vérifie si la catégorie figure à un arrêté ministériel (AM). Dans ce cas, elle suit également le processus regroupé.
Si la catégorie ne correspond à aucun de ces cas, l’établissement concerné peut lancer son propre appel d’offres selon les règles générales de la LCOP, et même procéder à un regroupement avec un ou plusieurs autres établissements, sans passer par le CAG.
Dans chacune de ces situations, l’adoption devient possible si un mécanisme d’approvisionnement est applicable, conforme et que le financement est disponible. En pratique, la possibilité d’intégrer une innovation dépend donc de sa compatibilité avec les cadres d’achat public, de la disponibilité budgétaire à l’intérieur des établissements et de la volonté d’un ou plusieurs d’entre eux de s’en prévaloir.
Les qualités intrinsèques du produit, de la technologie ou de ses bénéfices jouent un rôle relativement mineur dans un processus LCOP classique. Les devis sont le plus souvent descriptifs et non fonctionnels, ce qui limite la prise en compte de la performance, de la valeur d’usage ou de l’impact global de l’innovation. Dans la quasi-totalité des cas, le critère du prix demeure le facteur déterminant, tandis que la « qualité » reçoit un poids marginal dans l’évaluation finale.
Le déploiement de Santé Québec en cours aura certainement un impact sur le chemin vers l’adoption de nouvelles technologies médicales. Le sujet sera abordé dans une version ultérieure de cette Note d’information.
3.Le chemin “de novo” – Ouvrir un chemin d’adoption
Lorsque la nouveauté ne peut pas être intégrée dans une catégorie existante, il faut ouvrir un chemin d’adoption “de novo”.
Ce scénario suppose que le milieu hospitalier lui-même prenne l’initiative. Un établissement ou un groupe d’utilisateurs doit manifester un intérêt formel pour le produit ou la technologie.
Le fournisseur joue alors un rôle actif : il doit susciter cette demande et fournir les éléments nécessaires à l’analyse administrative, notamment des données de performance, d’efficacité ou d’impact organisationnel. Ces données ne constituent pas, à elles seules, un critère d’accès, mais elles servent à étayer la demande et à justifier l’ouverture d’un nouveau processus administratif.
L’objectif est de créer les conditions d’existence d’une nouvelle voie d’approvisionnement, permettant d’inscrire la nouveauté dans un cadre conforme à la LCOP.
4.Le rôle du Bureau de l’innovation et la décision finale
Une fois la demande du milieu appuyée, le dossier peut être transmis au Bureau de l’innovation en santé du Québec (BISQ) ou à une instance équivalente. Cette instance rend une recommandation qui oriente les autorités d’approvisionnement.
Si la recommandation est positive et acceptée, le produit retourne dans le cadre de la LCOP, en suivant le chemin applicable (CAG ou établissement).
Si la recommandation est refusée ou non acceptée, il n’y a pas d’adoption à ce stade.
Le processus est itératif : un refus ou une absence d’intérêt ne ferme pas la porte définitivement. Le fournisseur peut revenir en amont du parcours, renforcer son dossier, susciter un nouvel appui ou attendre l’ouverture d’une catégorie d’achat appropriée.
Notons que l’INESSS intervient dans le processus d’évaluation que sur demande d’un organisme relevant du ministère de la Santé et des services sociaux, y compris le BISQ, et que son travail vise essentiellement à confirmer la valeur des données probantes. Une entreprise ne peut pas déposer une demande d’évaluation non sollicitée. D’autres options d’évaluation sont offertes sur le terrain, notamment par certains établissements.
En résumé
Le processus d’adoption d’un nouveau produit dans le réseau hospitalier québécois est avant tout administratif et normatif. Il est tributaire des cycles de gestion contractuelle et budgétaires. Les délais peuvent s’échelonner de 1 à 18 mois (ou plus) selon l’ampleur et la complexité du projet d’approvisionnement et le chemin à parcourir.
Il repose sur :
- La conformité aux cadres d’approvisionnement publics (LCOP, CAG, AM), incluant les seuils de valeur contractuelle et le respect des règles de la Loi sur les contrats des organismes publics.
- La disponibilité du financement au sein des budgets des établissements, puisque les regroupements d’achats, y compris le CAG, ne financent rien et ne font que gérer les processus d’approvisionnement. Il se peut que, selon la nature de la dépense, le budget associé à l’acquisition doive figurer au Programme quinquennal d’immobilisations (PQI) de l’établissement, attribué par le MSSS.
- La capacité du fournisseur à ouvrir un chemin d’adoption “de novo” lorsque le produit ne cadre pas dans une catégorie existante.
- Les qualités intrinsèques du produit ou de la technologie jouent un rôle secondaire dans la quasi-totalité des cas, puisque les devis d’appels d’offres sont principalement descriptifs et non fonctionnels, et que le prix demeure le critère dominant dans l’évaluation.
Ainsi, l’accès au marché hospitalier dépend moins de la valeur ou du potentiel de l’innovation que de sa capacité à s’inscrire dans les mécanismes d’achat public existants, à mobiliser une demande issue du réseau, et à trouver un espace budgétaire disponible pour permettre son intégration.
Vous avez des questions sur le processus d’adoption d’un nouveau produit en milieu hospitalier au Québec? Les membres de BIOQuébec peuvent contacter Marika Filiatreault (mfiliatreault@bioquebec.com) qui se chargera de vous aiguiller.
À propos de BIOQuébec
BIOQuébec est une association sans but lucratif, entièrement financée par ses membres. Elle représente aujourd’hui plus de 330 organisations actives au Québec qui oeuvrent dans l’industrie des sciences de la vie et des technologies de la santé. Nos membres sont impliqués à toutes les étapes de la chaîne d’innovation en santé et contribuent significativement à l’amélioration de la qualité de vie des citoyens. Leurs activités incluent la découverte de médicaments, de vaccins et d’outils diagnostiques, leur développement, leur fabrication et leur commercialisation. BIOQuébec est la voix de l’industrie, favorise le maillage et le développement économique et agit comme lien entre le secteur privé et les parties prenantes.
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